Il est de bon ton de dire que la science est le dernier refuge pour ceux qui ont à cœur l'exigence des faits. Loin des fake news, de la désinformation et de la tentation idéologique, la science serait un des derniers bastions de la raison dans un monde déraisonnable.
Vraiment ?
L'obscurantisme au pouvoir : quand la pensée dominante entrave la connaissance, un essai signé par le journaliste indépendant Brice Perrier, dresse un portrait beaucoup moins idéalisé du monde de la science moderne.
L'auteur amorce son enquête à l'Académie des sciences avec sa secrétaire perpétuelle honoraire, Catherine Bréchignac, qui constate qu'au plus fort de la crise de la Covid, il était impossible de remettre en question les projections de mortalité produite par UNE seule épidémiologiste. « Nous étions plusieurs à trouver ces modélisations fausses et à nous demander pourquoi on la laissait parler, ... ».
Le débat scientifique, au nom de l'urgence, a été escamoté. « Il n'y a rien eu, car on ne pouvait rien dire » estime aujourd'hui Bréchignac.
Le concept de « noble mensonge » s'est souvent même imposé comme remède aux doutes dans la communication dite scientifique.
Le fact-checking, rempart vanté contre les fake news, devenait, dans la foulée, le nouvel horizon indépassable de la vérité.
Faire taire les fâcheux qui posent des questions ou incarnent une voix minoritaire dans le monde de la science n'est cependant pas qu'un travers observé en période de crise.
L'essai de Brice Perrier met en lumière un monde où la politique et l'argument d'autorité dépassent trop souvent l'impératif de curiosité qui devrait animer ceux qui ont la responsabilité de faire avancer la connaissance.
Un conformisme dangereux, particulièrement quand on mesure que « la vérification des médicaments, ça a été complètement abandonné à l'industrie pharmaceutique » explique Perrier.